Hélia HAKIMI-PRÉVOT, Quotidien du Médecin Hebdo n° 9966, vendredi 9 décembre 2022
Aux Hospices Civils de Lyon la radiothérapie guidée par IRM est proposée aux personnes atteintes de cancer depuis un peu plus d’un an. L’occasion, pour cet établissement pionnier en France en la matière, de faire le point sur les premiers résultats obtenus.
Les médecins des Hospices Civils de Lyon (HCL) sont les premiers en France à disposer de l’I.R.M-Linac Unity de la société Elekta. Cet équipement associe un accélérateur de particules de dernière génération à une I.R.M. de qualité radiologique (1,5 Tesla), permettant de cibler la tumeur avec une très haute précision et d’adapter le traitement à chaque séance en fonction de son évolution. Le premier patient a été traité en juin 2021. Depuis 120 patients ont été traité par l’I.R.M.-Linac

« Comparé à la radiothérapie classique associée au scanner, la radiothérapie guidée par IRM nous permet de mieux cerner la zone que nous souhaitons traiter. L’image obtenue est d’une qualité nettement supérieure à celle d’un scanner », souligne le professeur Olivier CHAPET, chef du service radiothérapie des HCL. « Nous pour adapter le faisceau d’irradiation à l’image du jour est donc au volume de la tumeur constatée lors de la séance de radiothérapie ».
Imagerie non ionisante, l’I.R.M. n’ajoute pas de toxicité au traitement, et lorsqu’elle est de qualité diagnostic elle offre une image similaire à celle obtenue en cabinet de radiologie. Elle permet ainsi de distinguer très clairement les contours de la tumeur et les organes voisins.
Vers une médecine personnalisée :
L’IRM donne également accès aux caractéristiques intrinsèques de la tumeur via l’analyse fine de l’image radiologique : vascularisation, zone d’hypoxie… toutes les informations décelées grâce au décryptage de l’I.R.M. donneront des indications sur la façon dont la tumeur réagira au traitement afin de mieux l’irradier.
Dans ces conditions l’analyse de l’image par IRM fait entrer la radiothérapie dans le champ de la médecine personnalisée.
« Près de la moitié des patients que nous avons traités avec l’I.R.M.-Linac présentait un cancer de la prostate. Pour ce type de cancer, le bénéfice a été la précision du traitement. La radiothérapie par IRM nous permet en effet d’envisager de réduire les marges de sécurité autour de la tumeur afin de diminuer l’irradiation au niveau des tissus sains » note le Pr CHAPET.


Autre point : « grâce à l’I.R.M. nous avons réussi à voir les structures ouvant être impliquées dans les troubles de l’érection et notamment les deux artères pudendales. Nous avons ainsi diminué la dose d’irradiation sur ces zones afin de tenter de préserver la fonction sexuelle » ajoute le thérapeute.
La deuxième localisation la plus fréquente pour laquelle l’I.R.M.-Linac a été utilisée aux HCL est le col de l’utérus, avec une trentaine de patientes traitées. « L’avantage majeur a été de pouvoir adapter, à chaque séance, le champ d’irradiation, en fonction de la position de l’utérus des patientes. Cela nous a permis de limiter le volume de tissus et organes irradiés aux alentours de l’utérus et de mieux préservert le grêle du champ d’irradiation pour réduire les effets secondaires (troubles digestifs) après traitement » détaille le Pr CHAPET..
La radiothérapie guidée par IRM est également utilisée pour traiter les cancers digestifs, ORL, les tumeurs du foie, du pancréas et durable. « Concernant cette dernière localisation l’I.R.M.-Linac est très innovante. Il s’agit même d’une nouvelle indication : elle nous a permis de traiter les patients fragiles dans les tumeurs rènales était difficilement accessibles à d’autres traitements (chirurgie, ultrason, cryothérapie) elle nous a aussi permis de cibler les tumeurs sans être invasifs, c’est-à-dire sans devoir poser une sonde »
Des perspectives encourageantes :
A ce jour aucune statistique n’a encore été publié sur les résultats de l’I.R.M.-Linac auprès des patients atteints de cancer.
« Mais nous savons déjà que ce traitement est très bien toléré il y a très peu de contre-indications. La quasi-totalité des patients adhère au traitement. Le stress et l’anxiété des patients à l’idée d’effectuer une I.R.M. (claustrophobie) n’ont pas été des facteurs dissuasifs » précise le Pr CHAPET. » Sur la centaine de patients reçus, seule une personne n’a pas pu être traitée : « la position allongée lui était impossible en raison de maux de dos » explique-t-il en ajoutant que ces premiers résultats sont très encourageants.
Actuellement deux projets de recherche ont débuté aux HCL : ils visent à étudier l’intérêt de l’I.R.M.-Linac dans la préservation de la fonction sexuelle dans le cancer de la prostate et dans l’identification des zones de radio résistance. Utilisés en routine dans 50 établissements à travers le monde, la radiothérapie guidée par IRM constitue un progrès notable dans le traitement de certains cancers.
Le Quotidien du Médecin hebdo. N° 9966, Vendredi 9 décembre 2022.