Ce cancer frappe 43 000 personnes chaque année en France et 17 000 en meurent (43 %). Pourtant, lorsqu’il est diagnostiqué à temps, il peut être guéri dans 90 % des cas. Il apparaît majoritairement après 50 ans. Avant 50 ans il est très rare chez les personnes sans facteur de risque familial ou personnel.
Il est toujours précédé pendant plusieurs années par une lésion bénigne, un polype, qui va peu à peu grossir et à terme peut dégénérer. Pendant toute cette période, ce polype va saigner goutte-à-goutte, de façon invisible à l’œil nu.
C’est pour cette raison qu’un dépistage systématique a été mis en place, destiné à découvrir ces saignements.


Les personnes (hommes et femmes) de 50 à 74 ans, sont invitées par courrier à participer à ce dépistage. Le test immunologique leur est remis par leur médecin traitant. Il consiste à prélever soi-même un seul minuscule échantillon de selle que l’on envoie au laboratoire, au moyen de l’enveloppe T fournie.
Si le test est positif (résultat sous huitaine) cela traduit la présence microscopique de sang dans les selles. Cela ne signifie pas il y a un cancer mais cela impose une coloscopie afin de préciser la cause des saignements.
Pourquoi conseille-t-on une coloscopie ?
La coloscopie est l’examen visuel de la muqueuse du colon (ou gros intestin). Elle offre une exploration extrêmement fine de la paroi et permet de réaliser des biopsies ou différents gestes thérapeutiques comme l’ablation de polypes. On la conseille en cas de symptômes orientant vers le colon, ou en cas d’antécédents familiaux ou personnels de polype ou de cancer, ou, et c’est le cas qui nous intéresse ici, en cas de tests de dépistage positif

Elle est réalisée à l’hôpital ou en clinique, au bloc opératoire ou dans un bloc d’endoscopie. Depuis une trentaine d’années et depuis l’apparition d’anesthésiques très maniables et très bien tolérés, les coloscopies sont pratiquement toutes réalisées sous anesthésie générale légère (neuroleptanalgésie).
Une fois le malade endormi, le spécialiste introduit par l’anus le coloscope, tube souple comportant une source lumineuse et une micro caméra dont les images, enregistrables, sont transmises sur un écran. Un canal permet le passage de pinces à biopsies et de différents instruments.
L’examen dure 15 à 30 minutes. Le malade commence à se réveiller dès la fin de la coloscopie, mais le passage en salle de réveil est obligatoire. Ensuite le patient peut rentrer chez lui s’il est accompagné. Il ne doit pas conduire jusqu’au lendemain, et un accompagnant doit dormir dans sa maison la première nuit.
On insiste sur la préparation : pourquoi est-ce si important ?
Le strict respect de la préparation est fondamental pour permettre un examen complet et ne pas risquer de méconnaître les lésions potentiellement dangereuses.
Cette préparation associe :
– un régime sans résidu pendant les trois jours qui précèdent l’examen : il faut proscrire totalement les légumes, les fruits, et les céréales complètes dont les fibres vont retenir les matières fécales.
–l’ingestion d’une solution laxative la veille et le matin de l’examen. Cette solution a une mauvaise réputation assez surfaite. Il est beaucoup plus facile de la boire si on la choisit sans arôme, si on la garde quelques heures au réfrigérateur afin qu’elle soit fraîche, et si on l’agrémente avec le jus d’un citron.
Il s’agit de ce que l’on nomme la “coloscopie virtuelle”. C’est en fait un examen radiologique, un scanner avec reconstruction 3D.
Mais la coloscopie virtuelle :
-ne montre pas les lésions de moins de 3 mm de diamètre
-exige une préparation parfaite identique à celle de la coloscopie réelle
-ne permet ni biopsie ni ablation de polype
Le test de dépistage est positif : Est-ce forcément un cancer du colon ?
Le test est positif dans 4 % des examens de dépistage. Cela exige une coloscopie dans le mois qui suit pour préciser les choses :
-dans 60 % des cas cette coloscopie ne montre aucune anomalie et on conseille un contrôle deux ans plus tard
-dans 40 % (des 4 %) la coloscopie se révèle anormale :
– polype avancé dans 30 % des cas
– cancer dans moins de 5 % des cas et dont plus de la moitié sont des formes débutantes.
Un test positif correspond donc rarement à un cancer, mais sans ce dépistage la lésion aurait progressé jusqu’à l’apparition des symptômes, le plus souvent synonyme de formes avancées
Certaines préparations, plus « douces » sont moins certainement efficaces et exposent à des examens incomplets, qu’on sera obligé de refaire.





Le dépistage du cancer colo-rectal est un examen proposé tous les deux ans aux hommes et aux femmes de 50 à 74 ans sans facteur de risque particulier.
Il s’agit d’un examen :
-simple
-indolore
-discret réalisé chez vous par vous-même
-gratuit
-fiable
–et qui peut vous sauver la vie
Malheureusement en France on ne parvient pas à le faire accepter.
Ainsi en 2020 dans la région Auvergne Rhône-Alpes seules 29,8 % des personnes invitées ont réalisé le test (32,5 % dans l’Ain) . Par comparaison, ce pourcentage est de 73 % aux Pays-Bas, 59 % en Angleterre et 46 % en Espagne. En outre, en France ce pourcentage a chuté de trois points par rapport à 2018-2019, vraisemblablement en raison de la CoViD-19 qui a obnubilé les esprits et occupé tout l’espace médiatique. On est loin des 45 % minimum préconisés par l’Europe pour infléchir les chiffres de mortalité par cancer colo-rectal :
Du fait de la CoViD-19 :
– un certain nombre de coloscopies ont été ajournées ou reportées faute de place
– les gens n’ont pas fait faire les dépistages conseillés, par crainte d’une contamination virale nosocomiale
– ils n’ont pas consulté en cas de symptômes, pour les mêmes raisons, ou faute de rendez-vous libre.
Pour les mêmes raisons ce n’est pas mieux pour le cancer du sein : 49,3 % pour la France, contre 78 % aux Pays-Bas, 75 % en Angleterre, 67 % en Espagne, pour un objectif européen de 70 %.Enfin, le dépistage du cancer du col de l’utérus, qui devait se développer en 2020, n’a toujours pas démarré…
Du fait de ces chiffres français navrants, aggravés par les conséquences collatérales de la CoViD-19, on s’attend à une catastrophe sanitaire dans les années à venir, avec un accroissement important des décès par cancer.
Si vous recevez une invitation à vous faire dépister n’hésitez pas une seconde : Faites le faire le plus vite possible : Votre vie peut en dépendre.
Afin de respecter le libre-choix des personnes il n’est pas possible de rendre ce dépistage obligatoire.
En revanche, pourquoi ne pas imaginer un système de « Bonus » minorant les tarifs des mutuelles en cas de dépistage effectué, sur le modèle du « Bonus » des assurances automobiles pour les conducteurs sans accidents ?
Photos : archives Dr Jean Bruhière